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Mandanda, c'est tellement évident en fait...
SaisonPublié le 13/04 à 01:00

Mandanda, c'est tellement évident en fait...

Lettre à Steve Mandanda, phocéen de la décennie.

Cher Steve Mandanda, 

je te dois des excuses. C'est la deuxième fois tu me diras mais le sujet n'est pas le même. La première fois, c'était il y a huit ans. Tu venais de faire une boulette à Valenciennes et je t'avais branché dessus dès la première question de la conférence de presse qui suivait. Forcément, ton poil était hérissé pour la journée. Je ne m'attendais pas à avoir le micro si vite. Déstabilisé, j'ai été trop direct, trop maladroit. On a pu en reparler quelques jours plus tard au Vélodrome. Je ne sais pas si tu t'en rappelles mais tu m'avais d'abord demandé si ton début de saison se résumait à ça avant de me dire que tu allais tout faire pour qu'on n'en parle plus. Ce qui s'est évidemment passé puisque l'OM a fini vice-champion de France au mois de mai suivant.

Aujourd'hui, il est question du titre de Phocéen de la décennie. Dès la mise en place de ce tournoi, j'ai assuré que la finale se jouerait entre Thauvin et Payet. Rien de personnel, on est à la limite du philosophique : peut-on consacrer un gardien ? Je t'avoue que j'ai du mal avec cette idée, comme j'étais un peu gêné, pour la symbolique, quand je voyais Casillas soulever avant Iniesta ou Xavi la coupe du monde ou l'Euro. Tu n'es pas sans savoir que le débat des émotions dans le football est à la mode. Et le détonateur, ce qui nous fait tous crier, dans ce sport, c'est le but. C'est pourquoi je me disais que, malgré tous tes efforts et ta longévité qui mérite le plus grand des respects, ce trophée se devait de consacrer autre chose, le frisson procuré par l'extérieur du pied de Payet contre Leipzig ou Thauvin qui s'arrache pour nous donner l'avantage contre Paris.

Mais au vu des très nombreux retours des supporters sur le Phocéen et ailleurs, j'ai eu tort. On ne répètera jamais assez cette phrase piquée à Jacques Attali : "La beauté du football, c'est que l'avis du chauffeur de taxi vaut celui de n'importe lequel de ses clients". Personne ne sait plus ou ne sait mieux. Tu fais l'unanimité et je n'ai qu'à m'incliner. Et en même temps, quand on se penche sur ta décennie, ce n'est pas bien compliqué d'être d'accord. Si les trophées UNFP se tiennent en fin de saison, tu seras très probablement pour la cinquième fois sur la période dans l'équipe-type du championnat (après avoir été sacré meilleur gardien en 2011, 2015, 2016 et 2018). Seuls Verratti et Thiago Silva ont fait mieux dans le champ. Ca, c'est pour le côté factuel. Mais l'histoire est encore plus belle. Il y a dix ans, l'OM était champion de France. Toi, dans un coin de ta tête, tu te disais que c'était ta plus mauvaise saison sous le maillot marseillais et qu'il fallait que tu te reprennes. Derrière tu feras un super exercice qui te vaudra d'être dans la short-list d'Alex Ferguson pour la succession de Van der Sar à Manchester. En fait, à l'image de l'OM, tu as pris un malin plaisir à revenir à ton meilleur niveau quand on présumait que tu n'avais plus faim. Avec Elie Baup alors que l'on annonçait l'OM en récession, avec Bielsa, où tu as dû réapprendre ton poste à vitesse grand V avec une plus grande participation au pied, à ton retour d'Angleterre, où nombreux étaient ceux qui voyaient ton retour comme une solution de facilité.

Et bien évidemment cette saison, ou après ton plus mauvais exercice à l'OM, tu sors peut-être ton meilleur. L'été dernier, deux supporters sur trois souhaitaient te voir quitter le club. Quelque chose me dit qu'ils se sont ravisés depuis. Comme moi et ma position sur les gardiens. Je me suis remis tes meilleurs matchs cette saison, ta fin de match à Nantes, ton double-arrêt spectaculaire contre Rennes, mais aussi tes matchs stratosphériques de 2016, celui à Caen où tu qualifies l'OM tout seul en coupe de France, ces matchs à Lyon, à Lille où tu multipliais les parades... sans toi, l'OM n'aurait pas été loin de la relégation cette année-là. Et sur le moment, si l'on souffle plus qu'on ne s'extasie, la fameuse émotion est tout aussi forte. Dans un club comme l'OM où l'on ne pardonne rien, voir quelques lignes plus haut, on ne dure pas par défaut. Alors même si ton histoire ici est loin d'être finie, merci pour tout Steve. Ce qui est déjà acquis, c'est que les années 2010 de ce club, ce sont avant tout les tiennes. 

Romain Canuti