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Football et Mafia : quoi de nouveau ?
Autour de l'OMPublié le 13/09 à 07:00

Football et Mafia : quoi de nouveau ?

Les liens entre football et grand banditisme constituent un sujet régulièrement traité depuis plusieurs années en France. Agents véreux, amitiés troubles entre stars du ballon rond et caïds du milieu, fascination réciproque entre ces deux mondes... tout cela constitue une source d'informations à sensation qui ne semble pas près de tarir, malheureusement. Ce jeudi, avec "Les Parrains du Foot", c'est un nouveau volume de cette histoire sans fin qui paraît, sous la plume de Mathieu Grégoire, Brendan Kemmet et Stéphane Sellami, et qui présente un angle d'attaque différent. De quoi susciter notre intérêt, puisque le premier cité n'est autre que le correspondant permanent de L'Equipe à Marseille. Mais attention, cet ouvrage explosif ne concerne pas que l'OM, loin de là, et tout le monde est servi. Interview :

Mathieu, que trouve-t-on de différent dans "Les Parrains du Foot" ?

Mathieu Grégoire : "Le sujet n'est évidemment pas nouveau, mais la façon dont on l'approche l'est. J'ai travaillé avec deux spécialistes des faits-divers qui possèdent de vraies sources police-justice et qui ont un regard assez clinique là-dessus, quand le mien est plus axé sur le football. On a travaillé non pas sur ce qui peut faire le buzz, mais sur les amitiés et la fascination réciproque entre voyous et stars du ballon rond. Ce sont beaucoup d'histoires incroyables qui dépassent largement le cadre de l'OM. Bien sûr, Marseille tient une place importante dans le livre, car il s'agit du club le plus populaire, qu'il y a dans cette ville une culture forte du banditisme et du clientélisme, qu'il y a eu plusieurs instructions judiciaires et donc une grosse documentation. C'est là aussi qu'est né le foot-business en France à la fin des années 80 et au début des années 90 avec les premiers gros transferts, et donc une source de revenus possible pour les truands. Mais, ces rapports entre les joueurs et le banditisme, notamment celui des cités, existent partout. C'est ainsi que l'on parle de Blaise Matuidi à Paris ou de Karim Benzema à Lyon, pour ne citer qu'eux".

Au-delà des liens traditionnels entre football et banditisme, vous évoquez beaucoup ces liens entre les joueurs et certains de leurs amis d'enfance...

MG : "C'est ce que l'on appelle le néo-banditisme des cités, avec ces voyous locaux qui veulent s'improviser agents et protecteurs des pépites du coin. C'est un schéma d'amitiés d'enfance ou de rencontres de soirées, où ils parviennent à mettre le grappin sur le joueur en lui rendant des services. Ils finissent parfois par intervenir sur les transferts et réclamer des commissions, comme dans cette affaire Matuidi, avec son ami tombé pour un trafic de stups. Il y a aussi des histoires d'amitiés incroyables, comme entre Karim Benzema et le fameux Zenati de l'affaire de la sextape. La loyauté envers ce dernier va indirectement lui coûter sa carrière en équipe de France, mais il était impossible pour lui de le renier. On pense aussi à Samir Nasri qui va s'associer avec un ex-voyou dans un bar à chicha parisien, ou à Franck Ribéry, qui s'est lié d'amitié avec des personnes de tous horizons lors de son passage à l'OM. Il est resté fidèle à ces gens-là, quitte à ce qu'ils entachent sa réputation. Cette fidélité a un prix, on le voit dans le livre, et il est parfois dur d'en sortir".

C'est aussi un avertissement pour les jeunes footballeurs ?

MG : "Oui, cela montre ce qui peut leur arriver, y compris pour les nouveaux champions du monde. Ils sont relativement préservés pour l'instant, mais il y a quelques histoires. Ils vont être l'objet de convoitises, comme l'ont été leurs prédécesseurs de 1998".

Enfin, vu de l'extérieur, le nouvel OM de Frank McCourt semble préservé. Est-ce l'effet de la fameuse liste noire des agents voulue par Jacques-Henri Eyraud ?

MG : "L'initiative est louable et on y consacre quelques pages, mais, pour moi, cette liste ne veut pas dire grand-chose, car ces agents ne travaillent plus avec l'OM depuis plusieurs années, disons depuis 2013. Ensuite, on peut se demander où la liste commence et où elle s'arrête. Il y a évidemment tous ces agents qui ont un rapport avec l'enquête sur les transferts présumés frauduleux et dont on n'entend effectivement plus parler. Mais on voit apparaître d'autres agents, notamment des étrangers, donc les procédures de contrôle doivent être étendues. Le vrai combat du club et de Jacques-Henri Eyraud, et je sais qu'il s'y attelle, c'est de lutter contre cet entrisme pratiqué par le banditisme. C'est un travail au quotidien. Son avantage, c'est qu'il n'a pas envie de s'encanailler, un peu comme un Deschamps à l'époque, et qu'il est assez proche des autorités".

"Les Parrains du Foot", par M. Grégoire, B. Kemmel et S. Sellami, aux éditions Robert Laffont.