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OM : les datas font-elles les bonnes équipes ?
Autour de l'OMPublié le 06/09 à 01:00

OM : les datas font-elles les bonnes équipes ?

Le tandem Villas-Boas - Longoria est adepte des analyses de données, que ce soit pour le recrutement ou la performance. Un virage positif pour l'OM ?

Au mois de mai dernier, l'OM connaissait une période très agitée avec le départ d'Andoni Zubizarreta et la menace de la fin de l'aventure André Villas-Boas. Heureusement, le coach portugais a fini par revoir sa position et, peu de temps après, il a été rejoint par Pablo Longoria à la tête du secteur sportif du club olympien. Un tandem atypique et jeune, notamment pour l'Espagnol du haut de ses 33 ans. En football, la jeunesse est souvent associée à la modernité dans l'approche du jeu et du recrutement, et les deux hommes n'ont jamais caché leur attraction pour le jeu vidéo Football Manager, source de données inépuisable pour les coachs et recruteurs en herbe. Cela tombe bien, puisque l'OM a clairement choisi de prendre le virage de la "Sport Data Analysis", que ce soit pour le jeu, le scouting, et même pour les autres secteurs de l'institution, comme l'expliquait au printemps Jacques-Henri Eyraud : "Un club de foot génère chaque jour des centaines de milliers de données. Analyser systématiquement ces données permet de prendre de meilleures décisions et donc d’être plus performants. Je veux que l’OM devienne le club français le plus avancé sur le plan technologique". Une option validée par André Villas-Boas et surtout Pablo Longoria, connu pour ses bases de données inépuisables sur les joueurs du monde entier. On peut, dès lors, se demander si de bonnes datas font de bonnes équipes, même si la réponse ne peut être aussi binaire.

"Toutes ces données, aussi importantes soient-elles, seront toujours dominées par les relations humaines entre les personnes qui travaillent ensemble"

Si les "Sport Data Scientists" sont désormais installés en nombre à l'OM, cela ne veut pas dire que le club va progresser d'autant. En revanche, il s'équipe afin de laisser le moins d'espace possible au hasard, que ce soit dans la performance à l'instant T des joueurs ou au moment de décider d'un recrutement. Ce type de management s'est largement développé en Angleterre depuis plusieurs années, mais aussi dans certains clubs précurseurs comme ceux du groupe Red Bull à Leipzig ou Salzbourg. C'est dans ce dernier qu'exerçait le coach allemand Peter Zeidler entre 2012 et 2015, l'époque où tout a commencé. Pour lui, il faut évidemment trouver le bon équilibre, comme il l'explique au Phocéen : "C'est un sujet passionnant et en même temps très sensible dans le football d'aujourd'hui. Il faut distinguer deux choses : d'abord, ces données sont primordiales et il faut les avoir, qu'elles soient physiques, tactiques et statistiques. On doit les utiliser et avoir un staff élargi avec des spécialistes aide beaucoup. Mais, le deuxième point est pour moi le plus important : toutes ces données, aussi importantes soient-elles, seront toujours dominées par les relations humaines entre les personnes qui travaillent ensemble, que ce soit le staff et les dirigeants, le coach avec les joueurs ou avec les recruteurs, et bien sûr les joueurs entre eux. Si on néglige ces relations directes, on commet une grave erreur. En revanche, si on est capable d'allier les deux avec le bon dosage, on est dans le vrai". Même constat pour le scout français Nicolas Baudoin, l'un des pionniers de l'analyse vidéo pour les clubs pros : "On ne peut plus se priver des datas si on veut exceller dans la performance. Regardez Ineos en cyclisme, qui mise sur les coureurs les plus endurants, les plus rapides et les plus performants à haute intensité, et regardez leurs résultats. Après en football, comme l'expliquait Arsène Wenger, vous pouvez posséder le joueur le plus performant du monde dans toutes les statistiques, s'il manque une relance à la 90e minute d'une finale de Champions League, tous les efforts d'une saison partent en fumée. À l'inverse, un autre moins performant peut faire basculer un match sur un coup d'éclat ".

"Si vous avez les joueurs les plus au point tactiquement, avec la meilleure VMA, les meilleurs volumes de courses et les choix de passes les plus pertinents, vous vous mettez à l'abri d'un grand nombre de désillusions"

Des réponses attendues, compte tenu de la glorieuse incertitude du football qui fait qu'encore aujourd'hui, un Carquefou peut éliminer un OM armé jusqu'aux dents un soir de Coupe de France. Ceci dit, on ne peut pas ignorer les progrès gigantesques accomplis en un minimum de temps ces dernières années par les clubs qui ont pris ce virage. Notamment ceux qui sont allés très loin dans l'expérience, et on en revient aux équipes de Red Bull. "Le groupe a effectivement été un précurseur dans ce domaine avec des analystes pour tous les compartiments du secteur sportif ou médical, confirme Peter Zeidler. Je me souviens d'un exemple précis à Salzbourg, où on recevait tous les matins les joueurs à l'entraînement en leur prélevant une goutte de sang au niveau du lobe de l'oreille. Les analyses étaient immédiates et, selon les valeurs relevées, on déterminait l'état de fatigue du joueur. Je ne me souviens plus du nom scientifique de ces valeurs, mais je sais qu'entre 500 et 800 le joueur pouvait s'entraîner. En dessous et au-dessus, il ne s'entraînait pas. C'est très bien, mais personnellement, j'aurais préféré lui parler avant, savoir comment il se sent. Là, c'était la prise de sang directe, avant même de dire bonjour (rires)". Un exemple radical et pas franchement emballant, et on se doute que la mentalité marseillaise nous met à l'abri d'une telle froideur à l'accueil des joueurs à La Commanderie. Mais, qu'on le veuille ou non, l'OM ne peut pas se permettre de ne pas mettre toutes les chances de son côté. "Si vous avez les joueurs les plus au point tactiquement, avec la meilleure VMA, les meilleurs volumes de courses et les choix de passes les plus pertinents, vous vous mettez quand même à l'abri d'un grand nombre de désillusions, explique Nicolas Baudoin. Même chose pour le recrutement, plus votre base de données est large et documentée, plus vous gagnez du temps. On le voit avec le succès des clubs qui ont misé là-dessus. Je pense à Liverpool qui est pour moi le plus bel exemple, avec le directeur sportif Michael Edwards qui est un ancien analyste. Avec Klopp, ils ont toujours un temps d'avance en terme de stratégie, que ce soit dans le jeu, les compos d'équipe et le recrutement". On ne sait pas si les Gueye, Balerdi ou Nagatomo ont été choisis grâce à leurs données, mais on se doute que le tandem AVB-Longoria savait tout sur leur compte avant d'appuyer sur le bouton. Reste à se faire une idée sur la durée...