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OM : et maintenant, analyse, scouting & trading
Autour de l'OMPublié le 27/05 à 01:00

OM : et maintenant, analyse, scouting & trading

Éclairage sur le nouveau virage que souhaite prendre l'OM.

Le vent du boulet est passé près, très près même. Après le départ d'Andoni Zubizarreta, l'OM et ses supporters n'en menaient pas large. Il faut dire que la fuite dans la foulée d'André Villas-Boas semblait plus que probable, et que l'on se préparait au constat d'un champ de ruines, d'un OM certes qualifié pour la Champions League, mais sans entraîneur et avec un effectif dépouillé de ses meilleurs éléments. Et puis le vent a tourné, et le boulet a dévié de sa trajectoire avec la décision d'AVB d'honorer finalement sa dernière année de contrat. Un drôle d'ascenseur émotionnel en l'espace d'une soirée, comme si le soleil s'était enfin levé après plusieurs jours de ténèbres.

Eyraud : "Je veux que l’OM devienne le club français le plus avancé sur le plan technologique"

Finies la grande braderie, les listes de coachs improbables, l'interrogation sur la participation à la LdC... la question est maintenant de savoir comment l'OM de Villas-Boas va s'articuler, avec quel directeur sportif, et surtout avec quelle politique. Sur ce point, Jacques-Henri Eyraud a donné des indications précises sur le projet de l'OM dans sa profession de foi publiée sur le réseau professionnel Linkedin. Une communication inattendue et décriée, mais contenant pourtant des informations plus qu'intéressantes sur le plan sportif. Celle sur le virage technologique que le club souhaite amorcer en particulier dans ce domaine : "Un club de foot génère chaque jour des centaines de milliers de données provenant du terrain, expliquait JHE. Analyser systématiquement ces données permet de prendre de meilleures décisions et donc d’être plus performants. Je veux que l’OM devienne le club français le plus avancé sur le plan technologique. Cette culture analytique est d’ailleurs utile lors de nos recrutements... Nous devons continuer à prendre des risques calculés, tout en respectant une discipline budgétaire essentielle à l’heure où le retour à l’équilibre financier n’est pas une option mais un impératif". En clair, l'OM veut se moderniser en matière d'analyse et de recrutement, et se baser sur le scouting et le trading. Deux mots qui hérissent le poil des détracteurs d'anglicismes et des défenseurs du football à papa, mais qui nous paraissent très intéressants.

Un spécialiste du Sport Data Analysis : "Liverpool est pour moi le plus bel exemple, avec le directeur sportif Michael Edwards qui est un ancien analyste"

Tout d'abord, penchons-nous sur l'analyse de données. Elle existe depuis longtemps dans tous les clubs, y compris à l'OM. Dans le domaine sportif avec les performances des joueurs en match comme à l'entraînement, mais cela ne va pas beaucoup plus loin. On calcule la moyenne de kilomètres parcourus, les sprints, les passes vers l'avant... et guère plus. Pareil dans le domaine médical ou la prépa physique avec le suivi biologique, la VMA, la récupération, et tout le travail sur GPS. Mais, le progrès ne s'arrête jamais et l'OM souhaite maintenant entrer de plain-pied dans l'ère de la "Sport Data Analysis" avec le recrutement d'une cellule complète, comme cela se fait en Angleterre ou en Allemagne. Il s'agira d'analyser en permanence les données d'entraînement et de match, d'offrir des stats sur les risques de blessures, mais aussi de tenir à jour des données complètes et individualisées pour la cellule de recrutement. Cette dernière activité est même le point central de cette nouvelle évolution, et l'OM recherche dans ce sens des "Sport Data Scientists", à savoir de jeunes ingénieurs spécialisés dans l'analyse de données statistiques. Encore des anglicismes, c'est vrai, mais gardons à l'esprit que les Anglais ont inventé le football et qu'ils sont encore à la pointe de ces nouvelles manières de le développer. "Tout part des États-Unis avec le foot US, le baseball, la NBA... explique au Phocéen le scout Nicolas Baudoin, l'un des pionniers de l'analyse vidéo en France. Mais en football, Liverpool est pour moi le plus bel exemple, avec le directeur sportif Michael Edwards qui est un ancien analyste. Avec Klopp, ils déterminent leur stratégie en début de saison et savent tout sur l'état de leurs joueurs en temps réel. Si Klopp estime qu'il va devoir mettre le paquet sur les côtés sur un match et que ses stars comme Mané ou Salah ne sont pas au top physiquement, il ne les fera pas jouer. Il préfèrera mettre un autre joueur qui sera en mesure d'avaler plus de kilomètres en sprint, parce qu'il va faire confiance à son data scientist qui lui a donné ces indications. Évidemment, il a l'effectif pour, mais ce sont des détails qui font la différence sur une saison". La meilleure recette reste bien sûr d'avoir de bons joueurs, mais le football tel qu'il est pratiqué aujourd'hui au plus haut niveau ne peut plus s'en contenter.

"C'est ce que fait très bien Luis Campos à Monaco puis à Lille, il est le meilleur pour ça, mais il faut tomber sur quelqu'un comme lui ou alors être très riche"

L'autre aspect intéressant de cette évolution technologique concerne le recrutement et la vente de joueurs. Plombé par des contrats trop lourds et des salaires à l'avenant, l'OM souhaite donc opérer ce virage du scouting et du trading en se mettant à niveau sur ces nouvelles spécialités. En ce qui nous concerne, ce ne sont pas des gros mots, loin de là. Déjà, il faut garder à l'esprit que la phase 1 du Champions Project nous a, certes, envoyé en finale de l'Europa League et enfin qualifié pour la C1, mais elle a aussi propulsé l'OM dans les griffes du fair-play financier avec des déficits abyssaux et une masse salariale insoutenable. L'heure n'est donc plus aux contrats XXL pour des trentenaires, mais à la recherche de jeunes talents susceptibles d'allier performance et perspectives de plus-values. Salzbourg, Leipzig, Lille ou encore Nice le font avec talent, alors pourquoi pas l'OM ? Une tendance qui pourrait se dessiner très rapidement, même s'il ne suffit pas de le décider. "Tout le monde veut copier ces clubs, explique Nicolas Baudoin, mais il faut avoir les compétences pour. Si vous payez cher pour dix jeunes espoirs et qu'il n'y a que cinq qui réussissent, c'est un coup gagnant car vous rentabilisez très largement les cinq échecs. C'est ce que fait très bien Luis Campos à Monaco puis à Lille, il est le meilleur pour ça, mais il faut tomber sur quelqu'un comme lui ou alors être très riche. Si les moyens sont limités, c'est beaucoup trop dangereux. Tout le monde connait les 20 pépites françaises, mais on sait aussi que seules 3 ou 4 vont exploser. Alors, qui va prendre le risque de prendre les autres, hormis les très gros clubs ? Du coup, il faut faire du trading intelligent en misant aussi sur des joueurs plus expérimentés ou qui sont passés à travers les mailles et qui peuvent se relancer. En cela, la collecte et l'analyse de données sont essentielles, notamment l'analyse prédictive sur le potentiel des joueurs, leur état physique, les anciennes blessures... Cela se fait en amont et nécessite une parfaite synergie entre toutes les parties, du président au prépa physique en passant par les différentes cellules, et c'est le plus difficile".

Tout cela implique donc la mise en place de ces "Sport Data Scientists" que l'OM recrute et continue d'auditionner depuis plusieurs mois. Des spécialistes déjà en place dans le foot de haut niveau, mais aussi des jeunes à peine sortis d'écoles d'ingénieurs. Un projet qui semble éloigné à première vue des fondamentaux du sport et du football mais qui, bien orchestré par le directeur sportif dont le choix reste déterminant, peut s'avérer payant. A voir si l'OM, club instable par excellence, sera capable d'aller au bout de cette révolution.