Gérard Houllier livre les secrets de fabrication du RB Salzbourg

Au Red Bull Salzbourg, il y a le coach Marco Rose, de formidables jeunes joueurs et un centre d'entraînement high-tech. Mais au-dessus de tout cela, il y a une tête pensante que l'on connaît bien en France, puisqu'il s'agit de Gérard Houllier. L'ancien sélectionneur de l'équipe de France et coach de Lyon est depuis 2012 le directeur mondial de la branche football du groupe Red Bull. Il chapeaute donc Salzbourg, Leipzig, New York, et même les centres de formation que possède la marque au Brésil et en Afrique.

Pour Le Phocéen, il a accepté de livrer quelques secrets de fabrication du RB Salzbourg, le futur adversaire de l'OM demain jeudi en demi-finale de l'Europa League. Interview :

Gérard Houllier, comment un club du championnat autrichien peut-il impressionner à ce point au plus haut niveau européen ?

Gérard Houllier : "Tout d'abord, il s'agit d'un club hyper structuré et très bien dirigé par des gens très compétents. Il y a bien sûr le choix de l'entraîneur qui est très important, et puis cette politique de jeunes joueurs, qui ont souvent passé une ou deux années avec la réserve professionnelle qui évolue en deuxième division autrichienne".

Ce passage par le FC Liefering, c'est un passage obligé ?

GH : "Pas forcément, mais si vous prenez par exemple Dayot Upamecano, que nous sommes allés chercher à Valenciennes et qui est aujourd'hui à Leipzig, il a joué avec le FC Liefering lors des premiers mois. Il a basculé ensuite avec le RB en D1, et c'est le cas pour de nombreux joueurs de Salzbourg aujourd'hui. Ce processus constitue la base du club afin d'aider les joueurs à se développer dans les meilleures conditions".

La passerelle avec le RB Leipzig fait-elle aussi partie du processus ?

GH : "Pas obligatoirement, les joueurs signent où ils veulent. Je pense à Sadio Mané, que nous avons recruté à Metz (pour 4 M€) en 2012. Il a brillé à Salzbourg durant deux saisons, puis il est parti à Southampton (pour 15 M€) et enfin, il a rejoint deux ans plus tard Liverpool (pour 36 M€). En revanche, Naby Keita, qui rejoindra lui aussi Liverpool cet été, est passé par le RB Leipzig après Salzbourg. De toute façon, il est évident que les jeunes talents finissent par partir lorsqu'ils se révèlent, c'est le processus normal. Mais le RB Salzbourg a cet avantage de bien savoir repérer ces jeunes et de leur donner rapidement une chance de se développer dans des structures extrêmement professionnelles".

Puisque l'on parle de Naby Keita, comment avez-vous fait pour aller le chercher dans l'anonymat du FC Istres, où il n'a fait que quelques mois en Ligue 2 ?

GH : "Tout simplement parce que les clubs français ne l'avaient pas repéré ! J'ai mes réseaux, mais je ne vais pas vous révéler mes secrets (rires). C'est la même chose que pour Mané, Upamecano ou d'autres. Ce qui est sûr, c'est qu'ils ne se trompent pas souvent, ils ont un système de détection très pointu et ils vérifient tout. C'est probablement le meilleur système en Europe".

Il y a le côté détection et les résultats actuels, surtout en Europe, qui sont impressionnants pour une équipe du championnat autrichien. Comment expliquez-vous ce jeu aussi performant ?

GH : "Il y a une vraie philosophie de jeu dès les jeunes catégories qui rend cette équipe performante, à l'image de ce qu'a pu faire l'Ajax, et c'est la même à Leipzig ou à New-York. Le coach Marco Rose était l'entraîneur des équipes U16 et U18, notamment en Youth League, que le club a gagnée il y a deux ans. C'était déjà un exploit remarquable, mais arriver en demi-finale de l'Europa League après avoir sorti Dortmund et la Lazio est encore plus fort. Mais, pour en revenir à la philosophie de jeu, le point de départ de tout cela est le directeur sportif Ralf Rangnick, qui est à Leipzig et avec qui on a fait beaucoup de choses. Je le considère comme un génie du football. Son projet de jeu est très moderne, à l'image de celui de Klopp à Liverpool".